03 Oct Une transition et de bons petits plats pour votre association
Après nous être intéressés aux évènements responsables, attachons-nous à la question de l’alimentation, une thématique centrale de la transition écologique.
On sait qu’elle est largement impliquée dans le changement climatique. En Europe, environ 10% des émissions de gaz à effet de serre (GES) sont induites à l’agriculture (1). Mais des disparités apparaissent entre les pays membres. En Espagne (2) et en France, par exemple, environ 24% des émissions de gaz à effet de serre (GES) reviennent à l’agriculture, derrière le transport, et jusqu’à 34%, en France, si l’on prend toute la chaîne alimentaire du champ à l’assiette (3). Mais d’où proviennent-elles? Quelles actions peuvent être menées par votre petite ou moyenne association, pour vos évènements, vos déjeuners sur place ou au restaurant ?
L’alimentation pèse lourd dans la balance du réchauffement climatique
Disons-le de suite : tous les ingrédients n’ont pas le même poids dans la balance, tout comme il est essentiel de se pencher sur le cycle de vie des aliments. Ainsi, de nettes disparités apparaissent suivant la saisonnalité (vente directe Vs chambre de refroidissement), les méthodes de culture (conventionnelle Vs agroécologie), d’élevage (intensif Vs extensif), la provenance (local Vs monde), ou le nombre d’intermédiaires qui a été nécessaire pour préparer et distribuer nos aliments et produits finis (fait maison Vs cuisine préparée ou produits ultra-transformés).
Prenons quelques repères simples pour en avoir une meilleure idée :
- 15 ingrédients les plus et les moins émetteurs (En Kg eq CO2, pour 100 gr de protéines) :
(Source: Poore, 2018)
- Un fruit cultivé dans une serre chauffée génère 6 à 9 fois plus d’émissions qu’un même fruit produit en saison.
- Dans une récente étude menée par la ville de Barcelone, il a été analysé que 1 kg de pommes de saison transportées par bateau de Nouvelle Zélande va produire 4,1 Kg eq CO2, pour 4,4 Kg eq CO2 pour 1 kg produit localement mais emmagasiné pendant des mois en chambre froide (hors saison donc).
L’essentiel des émissions vient de la phase de production agricole. Le reste “est lié à la fabrication, à l’emballage, à la transformation, au transport et à la commercialisation alimentaire (20%), au déplacement des clients jusqu’au magasin (11%), au traitement des déchets alimentaires (7%)” (3)
Dans la phase de production, l’élevage est responsable à 80% des émissions. Cela incombe principalement à la production des aliments pour les bêtes et à l’éruption des ruminants (vaches, moutons) qui rejettent du méthane (CH4), un gaz au pouvoir de réchauffement 24 fois supérieur à celui du CO2. C’est pour cela que l’empreinte carbone des bovins est beaucoup plus importante que celles des porcs ou des volailles.
Vient en cause ensuite le protoxyde d’azote (N2O), qui se libère du lisier et fumier ainsi que de l’épandage d’engrais de synthèse. Ce gaz, lui, a un impact sur l’effet de serre 300 fois supérieur au CO2.
Dans la balance, tous les experts s’accordent donc sur un point essentiel : il est urgent de réduire notre consommation de viande, essentiellement rouge. L’accaparement des terres que l’élevage engendre au niveau mondial est immense, spécialement si on le compare à ses apports nutritionnels (“il ne fournit que 16 % des calories consommées dans le monde, selon l’institut for Climate Economics-I4CE) (4). Il est notamment directement impliqué dans la déforestation au Brésil pour la production de graines, d’huiles et de tourteaux de soja pour nourrir les bêtes en Europe. Ainsi, selon la FAO et son premier rapport de référence “ L’ombre portée de l’élevage“ (2006), l’élevage représente au moins 14,5 % des émissions totales mondiales de gaz à effet de serre.
Ainsi, même si la tendance de la consommation de viande est à la baisse en Europe de l’Ouest, celle-ci augmente globalement, notamment en Europe de l’Est. La moyenne européenne est de 77 kg/an, soit 211 g par jour (5). C’est loin des recommandations du Haut Conseil de la Santé publique (en France), qui suggère de ne pas dépasser 500 gr par semaine (hors volaille) (6), ou encore celles du rapport de référence EAT – LANCET (voir lien en bas de page), qui recommande de consommer pas plus de 100 gr de viande rouge par semaine pour faire tenir notre alimentation dans les limites de la planète.
On l’aura compris, il est essentiel de végétaliser notre assiette, d’autant plus que la transformation en cultures des terres actuellement accaparées par l’élevage permettraient de capter plusieurs milliards de tonnes de CO2 (7).
Dans la pratique, pour ses évènements
Devoir organiser un catering pour un évènement, voire un pot en interne, nous pousse parfois à choisir des offres économiques pas toujours alignées sur une alimentation saine et durable. Cependant, ces occasions sont importantes pour inscrire votre association dans la transition du système agroalimentaire et pour donner le goût du bien manger à vos équipes. Vous tournerez donc votre regard vers des prestataires durables qui prennent en compte les enjeux de santé publique (surpoids, diabète, etc..) mais aussi sociaux, économiques et environnementaux (juste rémunération des fournisseurs, emploi de personnes en situation de précarité, protection des ressources naturelles, lutte contre le gaspillage alimentaire, etc.)
Pour cela, comme conseillé dans le guide “pour une restauration événementielle durable” de l’Ademe (6), la première démarche est de rédiger un cahier des charges, dans lesquels vous pourrez spécifier vos critères de choix :
- Aliments frais, de saison et locaux, de préférence bio,
- Menu végétarien prédominant, en demandant de réajuster la part du végétal dans les assiettes, qui doit être supérieure à la part de viande ou de poisson,
- Boissons chaudes issues du commerce juste,
- Carafes d’eau au lieu de bouteilles en plastique,
- Choix d’une vaisselle réutilisable,
- Une viande de qualité (élevage en pâturage, labellisée),
- Produits de la pêche durable,
- etc.
Prévoyez d’échanger avec votre fournisseur sur la proportion accordée à chaque action (100% ou moins) et demandez des garanties sur les labels utilisés (AB, Commerce équitable, etc.).
Pour lutter contre le gaspillage alimentaire, le talon d’achille de l’évènementiel, plusieurs actions peuvent être mises en place pour le minimiser :
- Coordonnez avec votre prestataire la date la plus proche de l’évènement pour informer du nombre exact de convives (prévoyez les désistements de dernière minute),
- Proposez des options de menu aux convives lors de l’inscription pour vous assurer de les satisfaire,
- Prévoyez des ingrédients secs (sans risque sanitaire) que vous pourrez redistribuer si besoin aux participants sous forme de doggy bag,
- Une fois l’évènement terminé, demandez à calculer les pertes par convive pour mieux réajuster vos commandes dans le futur.
“En France, les pertes et gaspillages alimentaires représentent 10 millions de tonnes par an, pour une valeur commerciale théorique de 16 milliards d’euros et environ 3% des gaz à effet de serre de l’activité française.” (source: ecologie.gouv.fr)
Dans la pratique, les repas au bureau ou au restaurant
Le cas de la restauration collective étant peu présent dans le secteur associatif, centrons-nous sur les repas apportés depuis le domicile ou pris au restaurant.
Commencez par créer un espace cuisine convivial, muni des équipements nécessaires pour favoriser le fait maison et d’espaces de communication pour sensibiliser vos collaborateurs.
De la simple machine à café à un coin “cuisine” adapté, les quelques mètres carrés qui les séparent peuvent avoir un réel impact. Les habituels thés, infusions, micro-ondes et frigidaires peuvent être accompagnés de quelques ustensiles de cuisine, de vaisselles non jetables et de planches à découper.
Dans votre espace de communication, mettez-y une touche personnelle et collaborative.
Si le calendrier des fruits et légumes de saison, la pyramide alimentaire, l’assiette santé de Harvard sont toujours bienvenus, explorez les idées pour que cet espace se convertisse en un projet fédérateur et motivant, et contribue au bien-être psycho-émotionnel de vos équipes. Incitez au partage de recettes, lancez des défis et des débats (sur les produits transformés par exemple), voire organisez de temps en temps des ateliers cuisine pour préparer des lunch box variées, saines et durables. À titre d’exemple, accompagnez vos équipes à combiner les céréales et les légumineuses, le duo gagnant approuvé par de très nombreux nutritionnistes et spécialistes de l’alimentation durable.
Pour ceux qui sortent déjeuner au restaurant, les labels de restauration durable peuvent vous aider à faire votre choix ou simplement à prendre mesure des critères associant environnement et alimentation. Parmi les critères les plus importants, on retrouvera dans la carte :
- Le respect des saisons
- Des produits locaux
- Une offre végétarienne relativement conséquente.
- Des produits biologiques
En Europe, on peut trouver les Labels Ecocook, Slow Food et FIG. Plus spécifiquement en France, on trouvera Ecotable, sans doute le plus complet, mais aussi Green Food.
Il est recommandé en tout cas de ne pas systématiquement demander de protéines animales quand vous allez au restaurant (une tendance croissante de nos jours quand la consommation de viande à domicile décline progressivement). Cela aidera les restaurateurs à développer une offre végétale plus diversifiée et attractive.
En conclusion:
C’est fini les repas pris devant l’ordinateur! Explorez les saisons, les modes de production, mangez moins de viande et faites-vous plaisir! Vous pouvez maintenant aller déjeuner!… et au retour parcourez les ressources suivantes, elles vous donneront de très bons compléments d’informations.
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Si vous aviez un seul rapport à parcourir:
“Alimentos, planeta, salud”, EAT Lancet (disponible en FR, EN, ES)
- https://www.eea.europa.eu/es/senales/senales-2015/articulos/la-agricultura-y-el-cambio-climatico
- https://www.miteco.gob.es/en/cambio-climatico/temas/mitigacion-politicas-y-medidas/agricola.aspx
- https://reseauactionclimat.org/poids-alimentation-emissions-gaz-a-effet-de-serre/
- https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/03/01/l-alimentation-mondiale-responsable-d-un-tiers-des-emissions-de-gaz-a-effet-de-serre_5429989_3244.html
- https://www.european-datalab.com/la-consommation-de-viande-en-baisse-en-europe-de-louest/
- https://www.inrae.fr/actualites/quels-sont-benefices-limites-dune-diminution-consommation-viande
- https://youmatter.world/fr/vegetaliser-alimentation-stocker-carbone-climat/
- https://librairie.ademe.fr/consommer-autrement/1758-pour-une-restauration-evenementielle-durable-9791029709647.html